L’art est un langage

« L’art doit être méditatif. Surtout en ces temps de pandémie. L’artiste permet de se raccrocher à autre chose, de favoriser l’introspection. »

Paul Maréchal, historien de l’art,

pour La Presse dans l’article « Méditatif, l’art » publié le 14 Novembre 2020.

La contemplation et la création d’une oeuvre d’art permet d’accéder à un état de concentration intense.


L’art est un langage qui communique avec les émotions. Il parle différemment à chacun d’entre nous. Il nous pousse à rencontrer notre sensibilité. Chez les artistes, la sensibilité devient un outil de travail. C’est grâce à elle que l’on peut comprendre le monde, que l’on peut se comprendre soi-même.


Connaissez-vous le syndrome de Stendhal ?


Ce syndrome est lié à une expérience vécue par l’écrivain Stendhal lors de son voyage en Italie à Florence en 1817.

Alors qu’il visite la Basilique Santa Croce et qu’il contemple les fresques de la coupole de la chapelle Niccolini, les Sibylles de Volterrano, il est épris de sensations et d’émotions intenses.

« J’étais arrivé à ce point d’émotion où se rencontrent les sensations célestes données par les Beaux Arts et les sentiments passionnés. En sortant de Santa Croce, j’avais un battement de coeur, la vie était épuisée chez moi, je marchais avec la crainte de tomber. »

L’art provoque des choses en nous et cette expérience vécue par l’écrivain, bien que poussé à son paroxysme, en est le parfait exemple. On peut donc naturellement se poser la question du lien en Art et activité cérébrale.

C’est ce que le neurobiologiste et collectionneur d’art Jean-Pierre Changeux a voulu montré dans ses recherches et ses écrits.

« La nouveauté d'une œuvre d'art, son pouvoir évocateur, sa valeur émotionnelle, entraînent un embrasement extraordinaire qui envahit notre espace conscient par sa globalité. Sa puissance mobilise les émotions avec une telle force qu'on peut imaginer une ignition “explosive” de la conscience, unissant système visuel, cortex préfrontal - le siège de la rationalité - et système limbique, cette région profonde du cerveau, siège des émotions primaires. »

Jean-Pierre Changeux lors de son échange avec BIBLIOBS en 2016.

Héléna


"...L'Art a tout à voir avec la vie..."

« Je ne fais ni de l’Art pour l’Art, ni de l’Art contre l’Art. Je suis pour l’Art, mais pour l’Art qui n’a rien à voir avec l’Art, car l’Art a tout à voir avec la vie »

Robert Rauschenberg

Ce qu’il y a de plus intéressant dans l’Art n’est pas l’œuvre en elle-même mais la façon dont elle a été produite. C’est l’approche de l’artiste, sa méthode de travail, de production.


Prenons le cas de Trisha Brown (1936-2017), artiste plasticienne, danseuse et chorégraphe américaine connue notamment pour ses performances et ses collaborations avec Robert Rauschenberg (1925-2008), Donald Judd (1928-1994) et Laurie Anderson. Sa démarche est tout à fait intéressante. Elle travaille dans une optique de libérer son potentiel créatif mais aussi d’être en accord avec elle-même.


Mais alors quelle est la clé pour atteindre ce potentiel et cette liberté d’esprit ?


Parmi les techniques de Trisha Brown, il y a celle de fermer les yeux. Mais ce n’est pas juste fermer les yeux, c’est s’empêcher d’utiliser la vue pendant la réalisation d’un dessin. Etrange ?


Pourtant, elle dit cette pratique être libératrice.

« I would know too well what I’m doing »

Voilà comment elle justifie ce comportement : « Je saurais trop bien ce que je fais ».


Se libérer du sens de la vue pour mieux laisser son inconscient, son corps s’exprimer. N’être finalement que dans le ressenti, dans l’écoute de ses mouvements. En enlevant le regard dans son processus créatif, l’artiste enlève son propre jugement, elle le questionne presque et ainsi apparaissent de nouvelles possibilités d’expérimentation mêlant l’inconnu, l’erreur, le risque et le hors cadre (ne sachant plus sur quelle partie de la feuille elle dessine, elle se laisse la possibilité de sortir du support). Un dessin « à l’aveugle » affranchi de toute l’expérience du regard et de son avis critique qui s’apparente étrangement à la définition du « lâcher prise ». Il n’y a rien de plus ancré dans le présent.


Dès lors fermer les yeux, vise à se reconnecter avec soi-même mais sans se couper du monde extérieur pour justement l’appréhender d’une nouvelle manière, presque innocente. On retrouve cette idée dans le travail de Trisha Brown : « soi-même » étant l’artiste et « le monde extérieur » la feuille de papier. Il s’agit de laisser aux autres sens la place de s’exprimer et peut-être d’amener de nouvelles choses.


Aborder le dessin par cet angle, est aussi une façon de désacraliser l’œuvre non pas en la rabaissant mais en lui enlevant toute la pression de la comparaison avec d’autres œuvres pour lui donner comme unique importance : celle d’exister ici et maintenant..

Héléna

Bien-Être@Aix